dimanche 28 février 2021

LE POIDS DE LA MENACE. L'ÉVALUATION QUOTIDIENNE DU RISQUE D'EXPULSION PAR LES ÉTRANGERS EN SITUATION IRRÉGULIÈRE



Un article de recherche passionnant, inspirant
Mots‑clefs : Sans‑papiers. Menace. Préfecture. Régularisation. Expulsion.

La vie des étrangers en situation irrégulière est marquée par l’insécurité inhérente à leur situation administrative. Au quotidien, les risques divers – de l’arrestation à l’expulsion – doivent être évalués au mieux pour s’en prémunir. À travers l’expérience d’undépôt de dossier de régularisation à la préfecture, cet article montre les difficultés à évaluer le risque dans un environnement où tout peut devenir menaçant.

Stefan Le Courant

Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative (lesc, umr 7186)

Maison Archéologie & Ethnologie – René Ginouvès

21, allée de l’Université

92023 Nanterre cedex

stefan.le‑courant@mae.u‑paris10.fr

samedi 27 février 2021

Poème d'Hassan Yacine " La Malédiction "




 Je trouve ce poème, du poète soudanais Hassan Yacine,  au fil d'une lecture dont j'ai déjà parlé ici, " Entre accueil et rejet, ce que les villes font au migrant ". 

Une pépite dans un endroit inattendu, un essai sociologique, entre deux chapitres. Malheureusement ce livre est manquant chez l'éditeur, quelques libraires l'ont, il faut bien chercher. 


Michel Agier (BABELS) l'a publié dans la revue tumulte, téléchargeable à cette adresse

https://www.cairn.info/revue-tumultes-2018-2-page-125.htm 

En voici une partie : 


Je suis une malédiction

Je suis la malédiction incarnée

Suspendu à ma corde secrète

Attaché à l'utérus du ciel

J'entends les cris du vents et les pleurs aux alentours

Je  parle aux fleurs autour de moi et j'admire le chant des murs

Ces murs de l'isolement infini 

Et la peur mon amie secrète

Rien ne me donne le sentiment de sécurité


Vous les passants face à moi

Ne demandez pas la miséricorde en mon nom

Comme pour un pécheur en attente du pardon

Détournez le regard

N'ayez pas pitié de moi

Donnez-moi un sac noir

Pour que j'y rassemble ma désolation

Ma défaite et mon anéantissement

Pour pouvoir le mâcher et l'avaler


Donnez-moi du feu pour que je brûle mes saletés

Je suis une charogne qui empuantit votre air

Jusqu'à vous faire détester vos corps élancés

Parfumés d'essences florales de Paris

Je vous inspire la haine de la race humaine

Mes semblables désarticulés

Ceux qui ont subi les horreurs de la guerre


Je suis une charogne où demeurent les vers

Je ne serai ni leur dernier rêve, ni leur dernière demeure

Ni ce qui reste de leur souvenir, 

J'ignore le dernier jour de ma mort

Laissez-moi reprendre souffle

Fermer les yeux pour me retrouver au paradis


Je n'ai envie de rien

Rien ne me séduit plus

Même pas le baiser de l'enfant que j'aurais pu avoir

Ni la jouissance au moment de sa conception

Ni la pénétration d'une partie de moi

Dans les vagins, berceau de mes espoirs incertains


Priez pour que mon heure arrive vite

Le moindre regard vers moi ne vous inspire que dégoût

Laissez-moi quitter votre monde d'artifices

Où je n'existe pas 

Je suis un anonyme sans identité, sans papiers

Un tas de détritus face à vos portes


Je m'abandonne entre vie et mort

Puisse Dieu me faire ange ou démon, qu'importe

Que ma mort soit subite

Si seulement les fleurs pouvaient pousser sur mon coeur 

Parfumaient les poumons et ornaient les vers 

Alors les battements de mon coeur partageraient la nostalgie du chant des cloches


Vos prières enveloppent ma peur

Mais je ne mérite pas le nom de corps

Parce que c'est mon cadavre pourri qui vous observe...


un été 2015

 


Quand un quartier de Paris, la Place des Fêtes, se retrouve confronté à l'arrivée de plus de 500 exilés, hébergés dans un ancien lycée. Un récit sociologique au millimètre, Radiographie d'un pan de ville secoué dans son humanité, ses différences, son identité. Une belle auscultation du comportement politique, édiles, habitants, associations. Ecole de la complexité du regard.


lundi 22 février 2021

samedi 20 février 2021

L'usage d'une ville








Tu ne sais plus tout à coup

Tu cherches

 Si tu tiens debout

oui

Je te regarde

Donne de l'ombre

Étends-la

Avance


mercredi 17 février 2021

Ville et clandestinité




La belle maison d'éditions " Le Passager Clandestin " publient la collection Babels ou Bibliothèque des frontières. Elle est née lors de l'appel de Michel Agier (Agence Nationale de la Recherche) pour des projets autour de la " Ville-refuge", concept issu à la fois de la tradition hébraïque remis à l'honneur par Lévinas et Derrida et de l'expérience des villes-sanctuaires américaines). La première assemblée des villes-refuges s'est tenu à Strasbourg en 1997. C'est certainement un signe pour mon compagnonnage sur l'exil avec le TNS ! 


Mais qu'est-ce qu'une ville ?

 Des lieux de vie ouverts ou fermés, ou les deux à la fois, c'est-à-dire ni vraiment l'un, ni vraiment l'autre, ouvert en principe à tous mais dont l'usage ou l'accès sont contrôlés et impossible pour une certaine catégorie de la population (ce que Foucault a appelé la "gestion différentielle des flux"). Des zones interdites, des rues mal famées, des quartiers dangereux, des endroits douteux où l'on a parfois ses entrées, ses attirances. Des recoins, des passages secrets. Des présences insoupçonnées, un jardin caché, un habitat invisible. Arrière-cours, sous-sols, terrasses aériennes.  Ainsi, dans cette géographie-là, intime ou secrète, le devenir clandestin est inscrit en chacun de nous, soit par désir de fuite, soit imposé par les conformismes de tous ordres. 

L'usage du mot clandestin sonne souvent comme une condamnation morale, il laisse penser que la clandestinité relève de la délinquance. Travailleurs ou passagers "clandestins" nuisent au bon fonctionnement de notre société. Alors que la clandestinité des exilés est un statut qu'on leur inflige par la prohibition de la mobilité, du coup monopolisée par les criminels, et par les politiques de refus de séjour, qui les maintiennent à l'écart des droits. 

Une ville n'est pas seulement une addition de lieux, c'est aussi un espace de vie que chacun s'approprie différemment. Selon son moyen de transport, selon son activité, selon sa place sociale, et selon l'agencement du désir ou de la contrainte. 

Ce livre examine, comment à partir de 2015 et la création notamment d'Eurocities, réseau de villes-refuges, les villes ont été active dans l'accueil des exilés, tout en réinstituant le système européen (frontières, camps, "gestion" des flux) à l'échelle urbaine. Paris, Copenhague, Istambul. 

mardi 16 février 2021

S'y mettre





 Un calme absolu, une énergie qui envoie tout vers l'intérieur. L'immersion dans le travail a commencé. On voudrait allonger les journées. En lisant des essais d'ethnologues-sociologues, idées et images se mettent à fourmiller. Fouiller, trouver des fondations pour la narration. Chercher sa langue. Rentrer en soi


lundi 15 février 2021

tu arrives et tu n'es plus vraiment sûr que quelqu'un t'attend



 Jour 1

Arrivée dans la ville vide

On viendra m'ouvrir la grille Nord

Entrée principale réservée au personnel

Toi tu prends l'entrée des artistes

Je peste (en silence)

C'est le cas de le dire

Le virus prend tout l'espace

Une chance que tu puisses encore franchir l'enceinte

Au travail